RO1 : la place importante des anciens d’active

Dans la dernière édition de notre revue Armée & Défense (oct. 2021), le colonel (R) Philippe Montalbot, 1er vice président de l’UNOR, proposait une réflexion concernant la place qu’occupent aujourd’hui les anciens militaires d’active au sein de la réserve opérationnelle, notamment de l’armée de terre.
A cette fin, il avait initié une question au Gouvernement. Nous vous proposons de lire la réponse faite par la ministre des Armée, mais dans un premier temps l’analyse faite par notre 1er vice-président.

Colonel Philippe Montalbot,
1er vice-président de l’UNOR et président national des organisations territoriales interarmées.

Mes Chers Camarades,

Nous veillions à l’équilibre des effectifs des cadres de la réserve opérationnelle sous ESR entre anciens militaires d’active et réservistes issus de la société civile (contingent, ab initio). Or l’instabilité du schéma de tutelle, fit que nous ne pouvions plus observer les évolutions, ni mesurer les dérives très perceptibles depuis plus de six ans, et la cohérence avec le discours proclamé à tous vents du lien armée-Nation.

Aussi, afin d’obtenir une réalité à vous restituer, j’ai pris l’initiative légitime à tout citoyen d’interroger un parlementaire qui mit en œuvre la procédure de la question au gouvernement. Je vous invite à consulter la réponse qui fut faite (pour l’armée de terre) avec la lettre d’accompagnement signée par Madame la ministre des Armées, que j’ai demandé de mettre sur le site de l’UNOR.

Vous lirez que le traitant-rédacteur ne manque pas de talent pour éviter le choc des chiffres. Après des notes sur le cadrage et sur la politique d’emploi des réserves de l’armée de terre, naturellement bienveillantes, on trouve la note « parcours professionnels des réservistes de l’AdT ». Il y est avéré que « le déséquilibre parmi les officiers supérieurs et les sous-officiers supérieurs entre réservistes d’origine civile dits ab-initio et anciens d’active est connu et assumé car transitoire et en cours de rééquilibrage ».

« De fait les ab-initio sont moins représentés que les ex-active, en valeur absolue aux grades supérieurs. La variation annuelle est cependant très favorable aux ab-initio, en particulier pour les officiers supérieurs et les sous-officiers supérieurs. Cette variation est même négative pour les ex-active ».

En effet le tableau montre une moyenne de + 26% d’officiers supérieurs en 2020 sur 2019, et + 28% d’ADJ, + 23% d’ADC et même + 80% de majors, quand on observe une baisse de 1 à 5% côté ex-active. On s’enthousiasme, on se dit que nos camarades exagèrent sur « le phagocytage des postes et des journées de convocation par les retraités d’active avec des ESR à rallonges », sur le copinage, ou le complément de retraite à bon compte, etc.

Mais, il y a l’autre tableau, avec les effectifs, qui permet de comprendre l’ampleur de la dérive et du talent du traitant-rédacteur pour le leurre.

De fait, par grade :

  • COL : de 8 ils passent à 10, donc + 25% en effet, mais face à un effectif de 230 ex-active !
  • LCL : de 36 à 46, à comparer avec l’effectif de 1 125 ex-active !
  • CDT : de 95 à 120, contre 688 !
  • MAJ : de 5 à 9, donc + 80%, face à un effectif de 859 ex-active !
  • ADC : de 22 à 27, contre 2 160 !
  • ADJ : de 31 à 49, contre 665 ex-active !

La confusion est donc bien entretenue dans le discours en faisant l’amalgame avec la prise en compte des catégories subalternes et des militaires du rang.

De fait, pour cette question précise concernant uniquement les catégories de grades supérieurs, la réponse est noyée dans la masse globale, et il n’est pas écrit que les ab-initio des catégories supérieures sont désormais quasiment éliminés. On supprime les modèles d’efficience et de rendement des entrepreneurs de la société civile, les valeurs ajoutées réciproques. Influence ? Cela interroge…

Nos armées seraient-elles donc – de nouveau – atteintes par la culture de l’entre-soi ? Rappelons-nous les conséquences en 1870. Le coût du retraité du vendredi qui reprend son poste le lundi suivant avec un ESR « long » est-il affecté au budget réserve ? Si oui, c’est un abus car il y a continuité de l’emploi. Ce qui prouve le manque de contrôles et d’éthique. Le discours du lien armée-Nation peut-il vraiment toujours tenir ? Quand on communique beaucoup sur une affaire c’est qu’il est déjà trop tard !

  • Lire la réponse de la ministre des Armées en cliquant ici

Les propos exprimés dans cet article ne représentent que et uniquement l’opinion de leur auteur. Ils n’engagent en rien la revue Armée & Défense et l’UNOR et ne sauraient être considérés comme constituant une prise de position officielle de leur part.

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